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Manifeste

Alors que plus de la moitié de l’humanité vit aujourd’hui dans des villes, ces dernières comptent un nombre interpellant de bâtiments vides. Le constat se révèle d’autant plus alarmant à une époque où l’accès à l’espace est soumis plus que jamais aux lois du marché. Des droits fondamentaux, comme l’accès au logement, sont alors considérés comme de simples produits financiers et sont sujets à une spéculation débridée.

Symptômes d’une course effrénée à la croissance infinie, ces espaces délaissés peuvent pourtant être reconvertis en tremplin vers un changement de paradigme : ils doivent être mobilisés pour répondre à des besoins urgents de logements, mais également pour explorer de nouvelles manières d’habiter, d’échanger, et de créer. Dans une logique d’économie circulaire, ces « déchets urbains » peuvent être réemployés par celles et ceux qui portent des projets engagés afin de construire la ville de demain.

 

Conscients de la valeur de ces ressources sous-exploitées, des opérateurs lucratifs vont jusqu’à ubériser les friches et les bâtiments vides, réintroduisant ainsi ces espaces dans le cycle qui avait initialement mené à leur déclin.  Face à cette pratique, Communa se positionne comme initiative d’urbanisme transitoire à finalité sociale en menant différentes actions concrètes :

Nous occupons temporairement des bâtiments vides. Ces lieux permettent de répondre au besoin urgent de logements décents et abordables. Outre les espaces que nous dédions à l’habitat et à l’hébergement, nous favorisons également l’émergence d’équipements collectifs utiles au plus grand nombre et gérés en commun.

Convaincu·e·s des limites du modèle individualiste, nous mutualisons les ressources et les compétences des membres de nos lieux. Des liens de solidarité se tissent et des formes autonomes d’organisation et d’entre-aide voient le jour.  

Pour que temporaire ne rime plus avec éphémère, nous avons vocation à influencer, par notre passage, les aménagements pérennes des lieux que nous occupons. Dans cette même logique, nous pérennisons nos projets par la propriété collective dans le but de libérer définitivement les bâtiments de la spéculation immobilière.

Afin d’augmenter notre impact social, nous essaimons en accompagnant et en formant des pouvoirs publics et des collectifs émergeants. Des projets aux valeurs similaires se multiplient tout en préservant la spécificité des contextes et l’autonomie des acteurs.

Les mécanismes de mutualisation que nous développons au sein de nos lieux s’appliquent également à nos actions. C’est pourquoi nous nous fédérons, au niveau local et européen, avec d’autres structures à finalité sociale afin de nous renforcer et étendre notre vision par-delà les frontières.

Pour garantir que l’urbanisme transitoire soit systématiquement mis au service du bien commun nous inscrivons, dans le droit et dans la culture, la notion d’occupation temporaire « à finalité sociale ».

 

Au travers de ces actions, Communa porte les valeurs d’expérimentation, de participation, d’ouverture, d’agilité et de frugalité.

—  Par l’expérimentation nous revendiquons le droit à l’erreur et valorisons les échecs autant que les succès. Nous n’attendons pas de plans parfaits pour démarrer et nous croyons en l’élargissement du champ des possibles par l’audace et la créativité.

Par l’ouverture nous portons le désir de créer des espaces abordables et conviviaux, où tout le monde est le bienvenu.

Par l’engagement nous affirmons la nécessité de construire des communs favorisant l’implication de toutes et tous pour que le plus grand nombre soit en capacité d’apporter sa contribution à la transformation de la ville.

Par la frugalité nous défendons une approche parcimonieuse et créative dans l’usage des ressources, pour faire mieux avec moins, sans modérer nos rêves et nos ambitions.

Par l’agilité nous assumons l’inscription de nos projets dans les contraintes du monde actuel. Au-delà de l’indignation ou de la quête de pureté, nous bâtissons un projet radical dans toute sa subtilité, ses nuances et ses imperfections, avec des ajustements, mais sans compromission.

 

Un proverbe du Moyen-Âge affirmait que « l’air de la ville rend libre » : les serfs qui s’y établissaient au-delà d’un certain temps pouvaient y acquérir la liberté. Autrefois, on se rendait en ville pour s’émanciper.

Renouons avec cette vision d’une ville ouverte et libératrice. Sortons-la des logiques mortifères de standardisation, de tout-au-marché et d’exclusion.

Partons des friches et des bâtiments vides pour reconquérir notre Droit à la Ville.

Commençons tout de suite et avec nos moyens, bâtissons une ville abordable, démocratique, résiliente et créative.

 

Manifeste écrit par les multiples mains de l'équipage de l'ASBL en avril 2021 

 

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